Le pied, nouveau critère immobilier ?
La pédibilité devient un critère d’achat d’une maison aux États-Unis

Le jeudi 17 mai 2012 par Hugues de Chassepierre

La "pédibilité" devient un critère de plus en plus important pour bon nombre d’Américains et notamment pour les plus âgés et les plus jeunes d’entre eux. Derrière ce terme, ce cache tout simplement la possibilité de faire moultes choses à pied (ou à vélo) à partir de son lieu de résidence... sans utiliser d’automobiles.

Au pays de la voiture-reine, cela peut sembler un peu inattendu, voire saugrenu. Cependant, les transformations sociales, notamment le vieillissement de la population, économiques, énergétiques - renchérissement du pétrole - et environnementales contraignent les Américains à réduire progressivement leurs déplacements en voitures. De plus en plus d’urbanistes, de collectivités locales, etc. en tiennent comptent. Les quartiers « futés » (smart communities) sont en plein développement depuis plus de 15 ans et la tendance devrait s’accentuer dans les années à venir (voir ici). L’Amérique des grandes banlieues étendues ne va pas disparaître du jour au lendemain mais elle devrait s’effacer peu à peu.

Preuve de ce mouvement, le site WalkScore.com donne des points de pédibilité aux quartiers de 2.500 villes américaines et pourvoit un service aux professionnels de l’immobilier de façon à ce qu’ils intègrent la pédibilité dans les critères de vente d’une maison - 15.000 sites internet, majoritairement usaniens, l’utiliseraient. Par exemple, le site CaliforniaRealEstate.com (immobilier de Californie) a introduit leurs données sur toutes ses annonces.

Fondé par deux idécuries, l’Institut Sightline, dédié à l’amélioration de la qualité de vie des habitants du Nord-Ouest des États-Unis, et l’Institut Brookings, l’objectif est très clairement écologique : plus les quartiers sont accessibles à pied ou en vélo, moins il y aura de voitures sur les routes et plus la pollution associée diminuera.

Comment la pédibilité est-elle définie par Walk score ?

Il s’agît avant tout d’un algorithme qui utilise les bases de données géolocalisées disponible sur internet (Google, education.com, etc.). À partir d’une adresse donnée, l’algorithme calcule le nombre d’équipements à proximité et la distance qui les sépare du logement. Tous les équipements (magasins, écoles, services de santé, etc.) situés à moins d’un quart de mille (environ 500 mètres) reçoivent le maximum de points - le nombre de points maximum est fixé à 100 ; tous ceux à plus d’un mille (plus de 1600 mètres) n’en reçoivent aucun. Autrement dit, l’algorithme et les points de pédibilité qu’il attribue aux logements sont avant tout une indication de distance mais ne donnent aucune indication sur la qualité de la marche à pied (trottoirs, pas de trottoirs, voies pédestres, circulation dangereuses, etc.). L’interactivité de la base permet seule de corriger ce défaut : les riverains sont encouragés à juger de la pédibilité des quartiers qu’ils habitent et à en faire part.

Dans le même genre d’idée, WalkScore.com développe un autre service : le transit score, soit les points de transit ou d’accès à un réseau de transport en commun. Prochainement, il est donc possible que la nouvelle norme américaine en matière de logement ne soit plus : « où puis-je garer ma voiture ? » ; mais plutôt : « que puis-je faire à pied à partir de chez moi ? Où puis-je aller en transport en commun ? »

Preuve de l’importance croissante de la marche dans le quotidien des Américains, walkScore n’est pas une entreprise isolée. Transport pour l’Amérique, la vaste coalition d’associations, d’instituts de recherches, de collectivités territoriales, etc. a elle-aussi définit récemment un index à peu près similaire : celui de la dangerosité pédestre, c’est-à-dire la probabilité en fonction du lieu où l’on se trouve d’être accidenté de la route en étant piéton (voir là).

Sans surprise, les deux cotations révèlent sensiblement la même chose. New York est une ville très pédestre. Elle compte 85 points de pédibilité sur 100. Certains de ses quartiers, comme Soho, Greenwich village, la petite Italie, en ont 100. De même, la vaste agglomération de New-York a un index de dangerosité pédestre de 30,4. Un chiffre très bas comparé aux 255,4 points de l’agglomération d’Orlando-Kissimmee, en Floride. De façon cohérent, Orlando a 47 points de pédibilité : elle est considérée par WalkScore comme dépendante de la voiture. Un peu entre les deux, la Nouvelle-Orléans, possède 57 points de pédibilité et un index de dangerosité pédestre de 107,1.

En croisant les deux cotations, ou en intégrant l’index de dangerosité pédestre au sein des points de pédibilité, il serait possible d’affiner les données et de définir des zones urbaines où il est réellement possible de faire beaucoup de choses à pieds... mais sans risquer sa peau !

Ce sera peut-être fait prochainement car vivre en marchant ou en pédalant - et non en automobile - devient un enjeux de société aux États-Unis et donc un enjeux immobilier. C’est une petite réflexion que devrait mener tout investisseur avant d’acheter une maison aux États-Unis ; investir dans des maisons de grandes banlieues ultra-dépendantes de la voiture n’est plus forcément une bonne idée...

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Le samedi 9 juin 2012 à 18h29
Rémy THOBOIS a clavit
Le pied, nouveau critère immobilier ?

Article tres intéressant , bonne continuation

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Auteur :

Hugues de Chassepierre s’intéresse à l’architecture et à l’urbanisme. Il a tout particulièrement un faible pour l’architecture nord-américaine. Un tipi au Montana, une maison dans les prairies ou un Monticello en Virginie, il ne sait pas encore où son rêve immobilier le conduira.

Notes :

Blogueville